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CAVITES SUR LA ZONE DU RESEAU DES FEES


COMMUNE DU LIEU


Grande Baume du Risoux

Baume de la Grande Combe

Description
Développement  :  env. 85m Dénivellation  :  env. -80m

Se trouve au sud du chemin de la Grande Combe, elle est signalée sur la carte nationale. C'est un orifice d'environ 4-5 mètres de diamètre donnant sur un puits d'un seul jet qui s'évase un peu à mi-parcours et qui se resserre de nouveau. Pendant de très nombreuses années, ce puits était obstrué à -45 m par un énorme amas de blocs mélangés avec des troncs, branches, ossements et déchets, mais après les désobstructions entreprises en 2015 et 2016, la profondeur du puits est passée à environ -50 m.

Au fond, un passage pentu de quelques mètres qui a été découvert en 2016 mène ensuite à un puits d'environ 30 m dont le fond est actuellement colmaté par de la glaise.

Photos de la Baume

[ Topographie 1988 ]

[ Topographie 1951 ]

Géologie

Calcaires du Kimméridgien.


Ostéologie

Lors des désobstructions en 2015-2016, de très nombreux ossements ont été ressortis et entreposés à l'extérieur, puis en été 2016 ces ossements ont été ramassés par l'ISSKA pour être déterminés par Michel Blant. Il y avait principalement des ossements d'animaux domestiques (veaux, vaches, cochons, moutons, chevaux) sûrement jetés dans le puits par des bergers ou des bouchers.

Toutefois, et grosse surprise, il y avait aussi deux ossements humain :

Le premier, est un fémur droit d'un homme adulte avec un début de carbonisation sur les extrémités ce qui montre qu'il a dû être brûlé ... ou on a essayé, en tout cas.

Le deuxième est un tibia gauche (ce n'est donc pas la même jambe) avec des fragments de mousse à une des extrémités.


Biospéologie

En mai 1951, des collemboles de la famille des Podurides ont été trouvé par Claude Besuchet sur un crâne de cheval remonté du fond du puits par Pierre-Jean Baron.


Légendes

Selon des croyances populaires, tous les contrebandiers de la région y jetaient leurs marchandises à la vue d'un douanier et que de ce fait, le fond de la baume était une véritable réserve de trésors avec montres, lingots d'or, tabac, etc. L'on prétend même qu'un douanier un peu trop curieux aurait suivi le même chemin (?!?).

Dans une autre version, relatée en 1888 dans le roman de Lucien Reymond, c'est un contrebandier dont l'amour du gain lui fut fatal car fut précipité au fond de la baume. Voici un extrait des pages de ce roman :

" Il y a une vingtaine d'années environ, un homme de B., pauvre père de famille, voulut, comme tant d'autres, essayer de la contrebande. Il ne réussit pas trop mal pour commencer, et continua pendant quelques années : en un mot, il en fit sa profession. Mais, comme toujours, l'amour du gain le perdit. Il se brouilla avec des contrebandiers français; on dit même qu'il noua des relations suspectes avec la douane. Quoi qu'il en soit, un matin du mois de novembre, un peu avant l'aurore, deux individus inconnus vinrent frapper à sa fenêtre, le priant de venir leur montrer le chemin à travers le Mont-Risoux, contre paiement, bien entendu. Notre homme y consentit sans méfiance. On le vit sortir de sa maison et se diriger vers la montagne; mais il ne revint pas. Jamais on n'eut plus aucune nouvelle de lui.
Les démarches réitérées faites en vue de le retrouver restèrent sans résultat, et sa disparition est demeurée un profond mystère. De quelques vagues renseignements obtenus longtemps après, on a conclu que ces étrangers étaient des contrebandiers déguisés, qui l'ont attiré dans un guet-apens. La version la plus répandue est qu'ils le précipitèrent dans l'une des grandes baumes qui existent au sommet du Risoux."

Une autre légende mentionne cette fois que lors de la retraite de l'armée Bourbaki en 1871, du matériel et des centaines de fusils auraient été jetés au fond de la baume par les hommes qui venaient chercher refuge en Suisse. Si les milliers d'hommes qui ont passé la frontière du Risoux est un fait historique, on a par contre jamais trouvé de reliques dans cette baume.

Une dernière légende attribue à cette baume une profondeur de 300 m ou encore qu'une rivière souterraine coule au fond vers -60m, information reprise par Fournier en 1923


Historique

Cette grande baume est connue depuis de nombreuses générations et elle mentionnée dans plusieurs écrits du XIXe siècle comme Roger 1822, Lutz 1836, etc.

Quant à la première exploration connue, elle est effectuée en 1897 par Le Royer. A califourchon sur un manche de balais attaché à une corde et assuré par une deuxième corde, il fut descendu dans le puits par des aides.

Au début du 20ème siècle, une nouvelle exploration est effectuée par MM. Allasia et Renaud de Gimel et Prévost de Montricher mais on ne connaît aucun détail sur cette expédition.

En 1923, le professeur Eugène Fournier (précurseur de la spéléologie en Franche-Comté) cite dans un de ses ouvrages que l'on entend une rivière au fond du gouffre, soit vers -60m.

Le 9 novembre 1924, deux lausannois, D.Dutoit, Docteur es Sciences, et E.Bonnard, géologue, descendent le puits devant une foule massée aux abords du gouffre.

Le 8 janvier 1928, deux citoyens de Vallorbe, MM. Golay (instituteur) et Zehnhäsern (pharmacien) furent descendus au bout d'une corde par des camarades.

Le 6 août 1950, première descente par une équipe de la SSS-Lausanne (GSL), mais avec seulement 30 m d'échelle ils n'atteignent pas le fond.

Le 13 mai 1951, nouvelle descente par la SSS-Lausanne (GSL) qui cette fois touche le fond et lève la première topographie de la baume.

GSL 1951

Par la suite plusieurs descentes seront effectuées par les spéléologues de la région et une nouvelle topographie sera effectuée en 1988 par le GSL. A partir de 2004-2005, suite à la découverte du Réseau des Fées et de son extension vers l'ouest, quelques descentes sont effectuées par le GSL ou le SCC pour vérifier la présence de courant d'air. Pendant cette période, la possibilité d'une désobstruction est aussi évoquée mais finalement abandonnée car les moyens à mettre en oeuvre semblent trop conséquent.

En 2015, le SCVJ décide quand même de tenter cette désobstruction et met alors sur pied un gros chantier en trouvant les fonds nécessaire pour les travaux qui seront mécanisés grâce à l'aide précieuse de la grue de Jean-Pierre Scheuner et Marianne Hirt. Un solide abri en métal est aussi installé au fond du puits comme protection contre les chutes de pierres.

Plusieurs clubs romands (SCVJ, SVT, SSG, SCC, GSR, GSL, SCN, SCNV) vont être invités à participer à ces désobstructions étalées sur plusieurs wek-end entre août et octobre.

Désobstruction 2015

En 2016, ce chantier interclubs est poursuivi pendant les week-end du mois d'octobre, puis lors de la journée du 5 novembre 2016 un passage est dégagé ... C'est l'euphorie car derrière il y a une suite, mais finalement c'est un puits d'environ 30m dont le fond est malheureusement colmaté. En décembre 2016, une petite équipe du SCC effectue encore une creuse au fond, mais sans succès. L'accès au collecteur sera peut-être pour une prochaine année ?


Bibliographie

Anon. (1924) : Exploration de la Grande Baume. - Feuille d'Avis de Vallorbe du 11.11.1924

Anon. (1924) : Exploration de la Grande Baume. - Feuille d'Avis de la Vallée de Joux du 13 novembre 1924

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Fournier E. (1923) : Explorations souterraines en Franche-Compté : Grottes et rivières souterraines. - Besançon, La Solidarité, Imp. coopérative ouvrière : 136-139

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Lutz M. (1836) : Dictionnaire géographique et statistique de la Suisse. Traduit de l'allemand et revu par J. L. B. Leresche. - S. Delisle, Lausanne, 2 volumes : 874 p.

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